BIEN GÉRER L'EAU
« Éviter les résidus de pesticides dans l'eau et optimiser l'irrigation »
Au coeur du massif du Lubéron, la cave coopérative Le Temps des Sages s'investit depuis plusieurs années dans une gestion durable des ressources en eau, à la fois sur les plans qualitatif et quantitatif. En 2015, elle installe pour ses adhérents une aire collective de remplissage et de lavage des pulvérisateurs. Les eaux de nettoyage sont récupérées et stockées avant d'être envoyées dans des Phytobacs. Il s'agit de quatre bacs en béton, étanches, d'une surface de 15 m2 chacun. Ils contiennent des graviers, de la terre, de la paille et des micro-organismes capables de dégrader en grande partie les molécules phytosanitaires. Ils sont recouverts d'une coque en plexiglas pour faciliter l'évaporation de l'eau. Le substrat des Phytobacs est utilisé pendant une dizaine d'années, avant d'être traité dans une filière spécialisée.
« Cette aire de lavage a bénéficié d'aides de l'Agence de l'eau à hauteur de 85 % pour un investissement de 130 000 euros, précise Olivier Lambert, directeur de la cave. Nous avons travaillé en collaboration avec la commune qui a mis un terrain à notre disposition. Nous sommes la deuxième entreprise de Cabrières-d'Aigues, et c'est aussi en concertation avec ses représentants que nous nous efforçons de réduire la pollution par les résidus de produits phytosanitaires. Nous devons justifier nos pratiques vis-à-vis des habitants et de nos clients, en particulier si nous voulons développer la vente directe. »
Zéro herbicide
En 2017, un GIEE est créé autour de six vignerons volontaires pour limiter le recours aux intrants chimiques. Il vise notamment à remplacer les herbicides par le désherbage mécanique, à abandonner les produits les plus dangereux (cancérigènes, mutagènes ou reprotoxiques, dits CMR) pour préserver la santé des utilisateurs, ainsi qu'à améliorer la gestion quantitative de l'eau. « Deux vignerons sont équipés et pratiquent déjà un désherbage 100 % mécanique, dont un proposant aussi des prestations. Nous visons zéro herbicide et le retrait du glyphosate devrait accélérer cette transition. Par ailleurs, nous testons des programmes sans CMR et nous développons l'utilisation des produits de biocontrôle. Ce sont notamment de bons compléments en début et en fin de campagne, mais ils seront sans doute insuffisants les années à forte pression. »
En partenariat avec la CAPL (Coopérative Agricole Provence Languedoc), deux stations météo automatiques ont été installées dans le vignoble, dont les données alimentent des modèles de prévision pour le mildiou, l'oïdium et le ver de la grappe, afin de traiter à bon escient. Ces stations ont également pour vocation d'optimiser l'usage de l'irrigation en plein essor.
Anticiper les stress hydriques
« Les vignerons s'équipent de plus en plus pour irriguer car les sécheresses récurrentes pénalisent la production. Depuis trois ans, les installations de goutte-à-goutte sont systématiques dans les nouvelles plantations. Certains produisent aussi du raisin de table mais le pilotage de l'irrigation en vigne de cuve est très différent. De plus, nous devrons peut-être faire face à des restrictions dans le futur. C'est pourquoi nous souhaitons élaborer des recommandations adaptées. » Pour la troisième année, les mesures réalisées par les stations météo sont traitées par un logiciel générant des préconisations d'arrosage. Il prend en compte les pratiques culturales ainsi que l'objectif de rendement, et anticipe les stress hydriques. Trois parcelles aux besoins variés (IGP, AOC entrée de gamme ou haut de gamme) sont suivies pour vérifier la pertinence de cet outil d'aide à la décision. « Il s'agit d'une solution simple et peu coûteuse car notre objectif à terme est de la généraliser, annonce Olivier Lambert. Cette bonne gestion de l'eau fait partie de la démarche de certification environnementale dans laquelle nous sommes engagés. »